Vitor Horst
La cloche annonce que le moment de la bénédiction du Saint Sacrement est arrivé. En silence, les religieux se sont rassemblés sur les bancs de la chapelle, prêts à recevoir les grâces propres à cet acte liturgique.
Après avoir entonné le Pange lingua, l’officiant fait trois fois un large signe de croix avec l’ostensoir enveloppé d’encens. Encore quelques prières et le Saint-Sacrement est placé dans le tabernacle. Un hymne à la gloire de la Reine du Ciel clôture la cérémonie.
Les religieux, cependant, n’ont pas encore quitté la chapelle. Des cartes imprimées contenant l’un des sept psaumes pénitentiels leur sont solennellement distribués. Ce n’est qu’après les avoir reçus qu’ils font une génuflexion, deux par deux, et quittent l’enceinte en rangs alignés, en chantant énergiquement.
À un certain moment, la musique s’arrête. Pendant quelques instants, on n’entend que les pas résolus du groupe qui avance. Puis, un des religieux commence à réciter les antiques psaumes de David et, au même moment, tous lèvent les cartes pour implorer le pardon de Dieu in rectus tonus.
Où va cette majestueuse procession ? Elle passe de la chapelle au réfectoire, où, après avoir nourri les âmes, on nourrira les corps. C’est quelque chose que tout être humain doit faire quotidiennement… Les membres de ce groupe, cependant, marquent ce besoin terrestre par une touche surnaturelle. Ils veulent que leurs repas, comme tous les actes de leur vie quotidienne, soient cérémoniels.
Le cérémonial est une consolation pour les âmes pénitentes, une joie pour les escadrons célestes, un délice pour les bienheureux. C’est le chant de l’Église catholique, un baume pour ses blessures, un écho de son passé et un appel à son avenir ! C’est la voix de l’Esprit Saint, un gémissement ineffable qui crie, un chant du bien-aimé. C’est le cri du Dieu des victoires et l’ornement de l’armada divine.
Celui qui mène une vie marquée par le cérémonial devient un frère des êtres angéliques, car il affirme par son attitude la supériorité de l’esprit sur la matière, tandis qu’il proclame que les chemins de l’Histoire sont marqués par ce qui se passe dans les hauts lieux célestes.
On peut affirmer, en effet, qu’il existe une chaîne d’or reliant le ciel et la terre, dont les maillons sont la vie marquée cérémonieusement. Dans chaque geste liturgique accompli avec conviction, dans les pas cadencés d’une procession, dans chaque mouvement synchronisé obéissant aux voix de commandement, dans la posture pieuse et recueillie pendant les repas ou la prière, le bon Dieu revigore son alliance avec l’humanité.
Par la splendeur de ses rites et de ses cérémonies, l’Église se pare d’une gloire dont beaucoup voudraient la dépouiller et hâte le jour de l’intervention du Très-Haut. Elle le crie à travers la fenêtre divine que le Ciel ouvre pour contempler les enfants de la Vierge avançant en rangs serrés contre l’œuvre de Satan. Car dans la guerre mystique et métaphysique que se livrent la Femme et le Serpent, certains des canons les plus précis sont utilisés sur terre, dans les actes accomplis avec solennité, compénétration et cérémonie.