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    La dame à la licorne

    Sr Daina Reis Lima

    Nous sommes émerveillés lorsque nous observons les œuvres d’art anciennes, surtout lorsqu’elles sont élaborées avec des techniques inconnues de nos jours. Nous sommes encore plus intrigués lorsqu’elles représentent des figures ou des scènes mystérieuses nous invitant à les contempler avec notre cœur afin d’en découvrir le sens.

    En ce sens, un ensemble de six tapisseries de la fin du XVe siècle intitulé « La dame à la licorne » retient notre attention. Tissé avec des fils de laine et de soie et aux couleurs dominantes bleu et rouge, il s’y reflète en elles l’innocence médiévale et le sens du merveilleux propres à cette époque historique.

    Les cinq premières pièces de cet ensemble représentent allégoriquement les sens corporels : l’ouïe, la vue, le toucher, l’odorat et le goût. Une dame apparaît toujours au centre de la scène, flanquée d’un lion et d’une licorne. Dans l’une d’elles, on la voit jouer une musique à l’orgue ; dans une autre, elle tient un miroir dans lequel l’animal mythique se contemple ; dans les autres, elle pose sa main sur sa corne, sent le parfum des fleurs offertes par une servante et se sert de mets qui lui sont présentés dans un bol.

    La sixième de ces tapisseries, dans laquelle la dame dépose des fleurs et des bijoux dans un coffre porté par un serviteur est plus difficile à interpréter. Comment déchiffrer la signification d’un tel geste ?

    Parmi les nombreuses explications données à travers les âges, une nous interpelle particulièrement : la scène refléterait l’attitude vertueuse de l’âme humaine face aux exigences démesurées des sens. Et la devise au sommet de la tente bleue – À mon seul désir — symboliserait le désir exclusif de Dieu, qui amène la dame à renoncer à tout ce qui pourrait obscurcir son esprit.

    En se débarrassant de ces ornements, elle agit avec sérieux, sérénité et force d’âme. Elle ne manifeste aucune affliction ni le moindre besoin de se repentir. On pourrait dire qu’elle ne s’est jamais laissée enivrer par la concupiscence. Elle évoque ainsi la Sainte Vierge, modèle de pureté sans tache, dont la volonté n’a jamais été gouvernée par la sensibilité, mais toujours par les plus hauts desseins du Créateur.

    À droite de la dame, nous remarquons un lion, image de la lutte contre nos passions désordonnées et nos mauvaises tendances. À sa gauche se trouve la licorne, avec qui elle échange un regard.

    Il est enrichissant d’analyser cet animal légendaire dans la perspective mystique de la bienheureuse Anne Catherine Emmerich. Dans une de ses révélations, elle le décrit comme extraordinaire et très séduisant, capable de gravir les plus hautes montagnes. Elle le dit bienveillant et pacifique, mais très réservé et insaisissable, ayant le don d’inspirer le respect même aux animaux sauvages et venimeux, qui lui rendent hommage et l’aident à se protéger. « Là où elle paît, là où elle va boire, tout ce qui est venimeux se retire. »1

    Selon une ancienne légende, cet animal sublime et insaisissable n’est attiré que par les vierges les plus pures, sur les genoux desquelles il se couche confiant et ravi. Selon la voyante de Münster, cela symbolise quelque chose de plus élevé : « cela signifie que la chair n’est sortie sainte et pure que du sein de la Sainte Vierge Marie. […] qu’en elle l’indomptable a été vaincu ; […] qu’en elle, l’humanité indomptée a été purifiée et vaincue ou que dans son sein le poison s’est retiré de la terre. »2

    Devant les réalités exprimées dans ce beau symbolisme, il n’y a rien à craindre. Celui qui a recours à Marie ne sera jamais confondu ! Grâce à elle, nous obtiendrons la force de maîtriser nos instincts désordonnés. Et même si nous sommes éloignés de Notre Seigneur, c’est en elle que nous purifierons nos fautes et que nous lui serons agréables.

    1. P. Karl Erhard Schmöger ,Vie d’Anne Catherine Emmerich, Volume 3, 1872, p. 444
    2. Ibidem

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